Н. П. Огарева лингвистические и экстралингвистические проблемы коммуникации теоретические и прикладные аспекты Межвузовский сборник



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Ouvrages cités


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Journalistique


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Лушенкова А.


(Лимож, Франция)

Le rôle de l’espace journalistique dans le roman de Marcel Proust A La Recherche du temp perdu


Afin d’analyser la notion du journalisme chez Marcel Proust, nous observerons d’abord la situation du journalisme à cette époque en France. La fin du XIX siècle est un moment crucial dans l’histoire du journalisme français, comme ce fut le cas en 1881 avec la promulgation de la loi sur la liberté de la presse. Le principe de la liberté d’expression a toujours été une valeur très importante pour les journalistes en France. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen a fourni le cadre général de la libre expression. La loi de 1881 (toujours en vigueur) concrétise cette liberté. Ainsi, la profession s’est-elle structurée, en définissant ses codes et ses pratiques.

Par ailleurs, la perfection de la technique de la gravure, de la reproduction photographique, l’invention de la linotype à cette époque rendent possible l’édition de journaux de haute qualité, et ce en quantité très importante. En outre, les métiers liés au journalisme prennent réellement une orientation professionnelle.

A cette époque, des hommes comme Girardin inventent un journalisme beaucoup plus diversifié, avec les inventions du fait divers, du reportage, de l’enquête, etc. Avec la IIIe République, la presse se renforce et attire à elle de nombreux écrivains, tels Honoré de Balzac, Guy de Maupassant et surtout Emile Zola. Ceux-ci collaborent largement aux journaux, en leur proposant des feuilletons, mais en réalisant aussi de nombreux reportages, enquêtes sociales, critiques artistiques, chroniques, éditoriaux. Chacun se souvient du fameux « J’accuse » de Zola, prenant la défense, à la une de L’Aurore, du capitane Dreyfus, injustement accusé d’espionnage.

Le journalisme du début du siècle va progressivement aborder les sports, la santé, les sciences, les grandes découvertes techniques, telle l’aviation ou l’automobile, et surtout le monde, que les grands reporters vont apporter chaque jour au domicile des lecteurs les plus modestes.

La littérature de l’époque donne cependant une image plutôt négative du journaliste. Plusieurs aphorismes acerbes du XIX siècle, visant la profession à laquelle la situation de pouvoir a conféré d’immenses et redoutables responsabilités morales, démontrent la méfiance des lecteurs et le mépris de hommes de lettres pour les journalistes. « Pour un journaliste, tout ce qui est probable est vrai »36, écrivait Balzac, le qualifiant en même temps de « sous-genre de l’homme de lettres »37. Par contre, Zola déclarait : « L’avantage du journalisme est de donner une grande puissance à l’écrivain ».38

On peut alors s’interroger sur la vision de Marcel Proust à propos du journalisme, notamment dans son roman A la recherche du temps perdu.
Marcel Proust a publié dans le Figaro quelques articles. En février 1907, il fit paraître dans le Figaro un article intitulé Sentiments filiaux d'un parricide, où il esquisse l'analyse de deux éléments fondamentaux dans sa future psychologie : la mémoire et la culpabilité. D'autres articles parus en 1907-1908 sont considérés comme des travaux préliminaires à son roman, dans lequel ils seront intégrés plus tard.

Au début de l'année 1908, Proust écrivit pour le Figaro une série de pastiches imitant le style de Balzac, Michelet, Flaubert, Sainte-Beuve et autres prosateurs du XIXe siècle.

Nous allons étudier maintenant comment sont représenté le journalisme et le journal dans l’univers romanesque de Proust, notamment dans A la Recherche du temps perdu.
Tout d’abord il faut remarquer que la plupart des personnages du roman sont des lecteurs de journaux tels que le Figaro, ou bien Le Journal des Débats politiques et littéraires, L’Écho de Paris et d’autres. Certains personnages sont, d’autre part, les journalistes. Le narrateur publie aussi un article dans le Figaro. Ainsi, la presse est-elle omniprésente dans le roman.

Dans la première partie du premier livre se trouve un long passage ayant pour sujet principal le Figaro. Il est assez remarquable de constater qu’à ce moment là du roman la grande partie des personnages du livre apparaissent. Il s’agit de deux types de personnages : soit chers au narrateur, comme sa mère et sa grande-mère, soit importants pour le déroulement du roman, comme Swann. Ainsi, le journal symbolise-t-il le point de rencontre des personnages. Le journal a donc pour fonction celle de réunir. Par ailleurs une autre fonction du journal se trouve ici: l’identification de la personnalité sociale des personnages. En effet, uniquement grâce au journal, le statut social de Swann est révélé à la famille de Marcel (même s’ils refusent de l’accepter). D’autre part, le journal choisi -Figaro- dévoile les opinions politiques de la famille de Marcel.

Une autre fonction que le journal possède dans ce passage est celle de la communication. Il donne aux personnages la possibilité d’échanger. La communication entre les sœurs de la grand-mère de Marcel et Swann au sujet de l’article où elles ont rencontré son nom reste non réalisée, mais beaucoup discutée entre elles. En revanche, il y a de longues discussions entre Swann et le grand-père de Marcel, suscitées par le journal. Mais il apparaît dans leur discours la critique du rôle trop important que la presse joue dans la vie de la société, tandis que les livres sérieux sont négligés. Il faut également accorder une place importante à la phrase révélatrice du grand-père sur la différence de qualité entre les journaux :  « ce n’est guère qu’un journal, mais du moins un journal merveilleusement écrit, ce qui fait la différence avec les assommants journaux que nous nous croyons obligés de lire matin et soir. »39 Aussi pouvons-nous grâce à leur discussion distinguer qu’un des sujets principaux de la presse de cette période est le monde même, ce qui semble intéressant du point de vue de l’histoire du journalisme.
La partie suivante du roman où la notion de journalisme apparaît se situe dans le livre Le Côté de Guermantes. Ici se présentent les trois personnages journalistes. Parmi les protagonistes qui sont impliqués dans cette scène nous retrouvons Marcel, Saint-Loup et Rachel. Les journalistes font, certes, une brève apparition, mais la situation dans laquelle nous les voyons est caractéristique. Ils arrivent en effet juste au moment où les personnages principaux se disputent : « Trois messieurs -trois journalistes- voyant l’air furieux de Saint-Loup, se rapprochèrent, amusés, pour entendre ce qu’on disait. Et comme on plantait un décor de l’autre côté nous fûmes resserrés contre eux »40. Ces personnages apparaissent comme antipathiques car ils sont visiblement importuns et en attente d’un scandale. Puis, Saint-Loup s’inquiète du fait que Marcel commence à tousser parce qu’un des journalistes fume. A sa remarque, le journaliste rétorque : « Il n’est pas défendu de fumer, que je sache ; quand on est malade, on n’a qu’à rester chez soi » 41. Saint-Loup finit par le gifler. Les amis du journaliste feignent de ne rien remarquer, ne voulant pas être mêlé au cas où une bagarre éclaterait. Le journaliste giflé préfère ne pas répondre à l’insulte. Ses amis, honteux de l’avoir abandonné, ne veulent pas reconnaître de l’avoir fait consciemment.

Ainsi, l’image des journalistes est-elle ici dévalorisée. Non seulement ils s’immiscent dans une scène intime, se comportent grossièrement, mais de plus se révèleront méprisants et lâches.


Les représentations suivantes du journalisme et des journalistes se trouvent dans la partie La Prisonnière. Marcel attend la publication de son article au Figaro. Son impatience à l’idée de le voir publié frôle l’obsession, démontrant le caractère du narrateur. Grâce à l’univers journalistique, la personnalité du personnage se révèle.

Puis un journal sera à l’origine du nouveau réveil de la jalousie. Quand Marcel lit un article mentionnant la comédienne Léa, dont la réputation était redoutable et dont il avait déjà été jaloux pour Albertine, cela lui provoque l’effet suivant : « Ce fut comme si on avait brutalement arraché de mon cœur le pansement sous lequel il avait commencé depuis mon retour de Balbec à se cicatriser ».42 Ainsi le journal a-t-il le pouvoir de provoquer des sentiments sur les personnages, notamment celui de la jalousie. De même ici, l’image du journal sert-elle aussi à découvrir la personnalité du narrateur, pour qui la moindre évocation du rival suffit pour raviver une jalousie douloureuse.

Dans le même livre du roman se trouve la représentation du journalisme, dans son analogie avec les mensonges d’Albertine, Gisèle et André. Le narrateur compare l’ensemble de leurs « mensonges respectifs »43 qui « s’emboîtaient si bien les uns dans les autres, tout en représentant une grande variété »44  aux duperies de l’édition du journal ou de la revue envers l’auteur. Des parallèles peuvent être faits entre les façons décrites de mentir des employés de l’édition et celles des copines. Par exemple, chacune des trois filles avait sa façon de mentir : « Gisèle ne mentait pas de la même manière qu’Albertine, ni non plus de la même manière qu’Andrée »45. Mais leurs menteries, en s’ajoutant, créaient un ensemble inabordable. Chacune des trois filles trompe Marcel en essayant de venir en aide l’une à l’autre. Pareillement dans le journal, chacun a sa façon de mentir. Voici quelques exemples :

« Le directeur du journal ou de la revue ment avec une attitude de sincérité […].L’associé de l’ « homme sincère » ment autrement et de façon plus ingénue. Il trompe son auteur comme il trompe sa femme, avec des trucs de vaudeville. Le secrétaire de la rédaction, homme honnête et grossier, ment tout simplement, comme un architecte qui vous promet que votre maison sera prête, à une époque où ne sera pas commencée. Le rédacteur en chef, âme angélique, voltige au milieu des trois autres, et sans savoir de quoi il s’agît, leur porte, par scrupule fraternel et tendre solidarité, le secours précieux d’une parole insoupçonnable. Ces quatre personnes vivent dans de perpétuelles dissensions, que l’arrivée de l’auteur fait cesser. Par dessus les querelles particulières, chacun se rappelle le grand devoir militaire de venir en aide au « corps » menacé.»46


Ainsi, le monde du journal ici peut une fois de plus préciser les caractères des personnages, car il induit des réactions spécifiques et déterminantes.
Dans la partie Albertine disparue, le journal Figaro apparaît de nouveau, et ce pour une raison très importante pour le narrateur. Son article est finalement publié. Cependant, au moment d’ouvrir le journal, il n’espère plus autant qu’avant d’y voir publié son article. C’est pourquoi, ayant remarqué la conduite de sa mère qui annonçait que dans le journal il y avait quelque chose d’important pour Marcel, il attend de voir l’article de l’un de ses auteurs préférés. A la place, il est agacé de trouver un article portant le même titre que celui qu’il avait envoyé à la rédaction. N’attendant plus la publication du sien, il est convaincu que quelqu'un a volé ses idées pour les publier. La colère le submerge. Même en ayant lu l’article jusqu’à la fin et ayant remarqué sa propre signature, il est tellement stupéfait qu’il n’arrive pas à réaliser qu’il s’agit là de sa propre œuvre. L’étonnement fini, il passe immédiatement à une autre pensée : ce n’est pas seulement lui qui a pu lire cet article, c’est au moins dix mille exemplaires qui ont été distribués. Ce tournant dans son raisonnement est très pertinent. Cela permet de voir à quel point il est important pour Marcel d’être apprécié en tant qu’écrivain, et au moins d’être lu. Il s’inquiète de savoir si tous les lecteurs ont bien lu son écrit. Il essaie même de s’imaginer un lecteur indépendant, recevant le matin un numéro du Figaro. Ne restera-t-il pas lu, son article ? Et si ce lecteur passe tout de suite aux nouvelles politiques ou mondaines ? Marcel est rassuré, parce que la longueur de son article est tellement importante qu’il serait difficile de passer à côté. Une autre angoisse survient. Les lecteurs feront-ils attention à son nom ? Lui-même, il ne regarde pas souvent les signatures des articles. Il se rend compte combien il est important pour lui, en tant qu’auteur, d’être reconnu. Un motif de fierté surgit. En même temps, ayant compris la nécessité pour un auteur d’être apprécié, Marcel se promet de toujours prêter attention aux signatures. Il essaie ensuite de lire le texte comme s’il était un lecteur ordinaire. Il imagine l’effet qu’aurait pu produire l’article sur des personnes de sa connaissance. Ce qui semble surtout fascinant pour Marcel c’est « le miracle de la multiplication »47 de sa pensée à travers les nombreux numéros du journal. Ainsi, la presse acquiert-elle le rôle de transmission des idées.

De plus, la fonction communicative de la presse peut être distinguée, et ce dans la sphère privée. Cela vient à l’esprit de Marcel qu’il pourrait continuer d’écrire au cas où son état de santé ne lui permettrait plus de voir ses amis, et rester par ce moyen en contact avec eux et continuer à leur transmettre ses idées.

Par ailleurs, plusieurs fois, le narrateur ressent l’envie de susciter l’admiration des autres à travers ses écrits ; la presse lui offre l’opportunité de séduire un public.

Ayant vu son article publié, Marcel est impatient de connaître les opinions des lecteurs, et il se dirige ainsi chez la duchesse de Guermantes. Dans la conversation il aborde le sujet de son article, suscitant ainsi le grand étonnement des invités. Il apparaît que personne n’a lu son texte, et ils expriment même des doutes s’il n’a pas confondu le nom du journal. M. de Guermantes se met à lire l’article tout de suite. Cependant, il ne semble pas être impressionné par l’article. Seulement le fait que Marcel ait trouvé de l’occupation entraîne ses félicitations.

En revanche, d’après Gilberte, qui n’exprime même pas la moindre envie de lire cet article, le fait de connaître un auteur est très flatteur pour le grand monde. Ainsi la représentation du journal sert-elle ici à dévoiler l’hypocrisie mondaine.

Le fait d’avoir publié un article a permis au narrateur de tirer la conclusion que seul un tel événement peut faire revenir des personnes, connues auparavant. D’un coup, tombé sur son nom dans un journal, ils ressurgissent du passé en écrivant, par exemple, une lettre de félicitations. En conséquence, pour Marcel Proust l’activité journalistique acquiert la capacité de faire le lien avec le passé, d’une communication entre les temps.

D’autre part, l’effet produit sur les personnes proches peut servir comme révélateur de leur personnalité profonde. Quelqu’un que l’on a pu considérer comme un très proche ami peut se montrer très jaloux du succès. Par exemple, la réaction de Bloch était assez étonnante, montrant des traits de caractère peu cohérents. Il garde le silence quand Marcel publie son article. En revanche, s’étant édité lui-même au Figaro plus tard, il est impatient de découvrir l’opinion de son ami. A ce moment il se sent obligé de parler aussi de l’article de Marcel, mais son rappel est paradoxal. Il traite le fait d’avoir écrit dans « le journal du sabre et du goupillon, des five o’clock »48 (comme il appelle le Figaro) d’une humiliation pour Marcel.

Marcel a tellement envie d’être apprécié par Bergotte, qu’il fait un rêve confirmant ce désir. Une fois de plus cela prouve la nécessité profonde de Marcel d’être compris et estimé, et son espoir de réaliser cette envie à travers son article.

Dans la dernière partie du roman Le temps retrouvé, Proust exprime le changement d’époque à travers les sujets de ses articles : les nouvelles mondaines sont remplacées désormais par les notes sur les enterrements, les citations et les banquets franco-américains. De la sorte, la presse n’exerçe-t-elle plus sa fonction habituelle de publicité pour le « grand » monde, et une nouvelle façon est inventée : il faut être vu à la table de Mme Verdurin.

On retrouve alors le thème du mensonge déjà évoqué dans La Prisonnière. L’auteur considère en effet que les nouvelles de guerre sont déformées par la presse. Néanmoins, les lecteurs ne veulent pas s’en rendre compte. A nouveau l’image du journalisme est mise en parallèle avec celle de l’amour :

 « Mais on lit les journaux comme on aime, un bandeau sur les yeux. On ne cherche pas à comprendre les faits. On écoute les douces paroles du rédacteur en chef comme on écoute les paroles de sa maîtresse. On est battu et content parce qu’on ne se croit pas battu mais vainqueur. »49

Nous trouvons également une phrase du personnage secondaire – un maître d’hôtel qui, en exposant sa vision de la guerre, glisse son avis sur les journaux : « Naturellement les journaux ont l’ordre de ne pas dire ça ».50 Ainsi Marcel Proust introduit-il la représentation de la méfiance des lecteurs par rapport à la presse, présente dans la société française.

Dans cette partie du roman nous trouvons également une interprétation ironique d’un article paru au Figaro, affirmant que M. de Norpois « avait dit en regardant Caillaux atterré : " Vous êtes le Giolitti de la France, oui, monsieur Caillaux, vous êtes le Giolotti de la France "»51. Les personnages se permettent de supposer avec un sourire qu’en réalité cette phrase avait été prononcée devant M. Caillaux moqueur.

Cependant, l’auteur livre une représentation précise de la forte influence des journaux sur les personnages mondains. Cela saute aux yeux du narrateur que les habitués des salons utilisent les opinions sur les événements de guerre dans la presse, en prétendant que ces idées sont les leurs.

Finalement, il paraît pertinent de mentionner le portrait ironique du journaliste M.Brichot, qui a critiqué la France d’être pacifiste avant la guerre, et qui se révèle arriviste pendant. Ici le journalisme sert à démontrer outre la variabilité, le changement continu de la personnalité humaine. Le refus de l’entourage d’accepter cela provoque l’incompréhension et le conflit. Mme de Forchevilles, ainsi que M. de Charlus, devenus à leur tour militaristes, n’arrêteront pas d’attaquer ses articles.

Ainsi, la représentation du journalisme possède-t-elle de nombreuses fonctions dans le roman de Marcel Proust. Dans A La Recherche du temps perdu ressort la vision ambivalente du journalisme de l’auteur ainsi qu’une forte présence de l’espace journalistique au sein de son roman. La représentation du journalisme permet tout d’abord de découvrir la personnalité profonde des personnages. Elle sert souvent à définir leurs caractéristiques sociales, ainsi que leurs traits psychologiques. Elle collabore également à caractériser le monde, ses côtés hypocrites et la grande capacité de la presse à influencer les salons. La fonction de la communication, exercée par les journaux dans l’œuvre est aussi importante, puisqu’elle est la pierre angulaire de la rencontre des personnages et les met en situation d’interaction. Le journal joue également un rôle de catalyseur : il exacerbe les sentiments du héros et, en définitive, certains traits de son caractère. Dans un même mouvement, cela permet d’apprécier la vision de Marcel Proust du caractère d’un auteur en général, son besoin d’être apprécié et entendu, son désir de reconnaissance. L’image du journal aide également à caractériser la nature des relations amoureuses (par exemple, le motif de mensonge, de confiance et de méfiance). En même temps le motif du journal entre dans le thème du temps, disposant de la place centrale dans le roman. Le journalisme acquiert la capacité de faire le lien avec le passé.

Finalement, la représentation de la presse dans ce roman est importante du point de vue de l’histoire du journalisme. L’auteur présente en effet les sujets les plus courants des journaux aux périodes qui précèdent et succèdent la Première Guerre mondiale. Il démontre l’attitude de la société française envers la presse et mentionne plusieurs journaux qui étaient les plus importants à l’époque, tenant ainsi le rôle de témoin d’une époque.

Bibliographie:


Ouvrage cité

Proust M., A La Recherche du temps perdu, Paris, Gallimard, 1988.





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